La glace

Vladimir Sorokine — 2005

Couverture du livre

L’homme se releva. Tous les deux s’approchèrent de Borenboim qui était ligoté. Celui-ci essaya de donner des coups de pied à Dibitch.

« Tiens-lui les jambes », dit-elle.

L’homme se jeta sur lui. Il entoura les genoux de Borenboim. Il les serra. Il se figea.

« Parle avec ton cœur ! » Dibitch prit un bel élan. Le marteau décrivit un demi-cercle en sifflant. Il s’abattit sur la poitrine de Borenboim.

Celui-ci poussa un rugissement.

Dibitch appliqua l’oreille contre son sternum :

« Parle, parle, parle… »

Borenboim rugissait. Il était secoué de soubresauts.

Dibitch recula d’un pas. Elle recula la main. Elle frappa. De toutes ses forces.

Le marteau se fêla. Des débris s’éparpillèrent çà et là.

Borenboim gémit. Il était suspendu aux cordes. Sa tête tomba sur sa poitrine.

Dibitch colla son oreille :

« Parle, parle, parle… »

Un son surgit au niveau du sternum.

Dibitch se concentra.

L’homme écoutait, lui aussi.

« Mo… kho… » articula Dibitch.

Elle se redressa, satisfaite :

« Il s’appelle Mokho.

— Mokho », prononça l’homme. Il se renfrogna. Il sourit.